J'ai adhéré au PSU (Parti socialiste unifié) alors que Michel Rocard en était le Secrétaire général. En 1974, le PSU soutien la candidature de François Mitterand à la présidence de la République. Après les élections, Michel Rocard veut s'engager plus avant et propose de rejoindre le Parti socialiste. Il est mis en minorité et quitte le PSU pour adhérer au PS. Pour cette période, je retiens un souvenir : 1978, les élections législatives perdues. L'Union de la Gauche progresse depuis la présidentielle de 1974, elle est majoritaire en voix aux législatives 1978 mais minoritaire en sièges. La droite l'emporte à nouveau et semble indétrônable. L'abattement est grand dans les rangs de la Gauche. Les responsables socialistes se relaient pour expliquer les résultats mis aucun n'évoque ce qui est à l'esprit de tous: la défaite. Michel Rocard intervient à son tour et parle comme seul Rocard sait parler, en disant les choses telles qu'elles sont. C'est une défaite de la Gauche. Mais il ne s'arrête pas là et invite la Gauche à reprendre le combat pour de prochaines échéances. Ce sera 1981 et la victoire de François Mitterand.
Un autre de mes souvenirs est la réunion publique que nous avions organisée à Montrouge avec Michel Rocard. L'affluence est telle qu'il faut sonoriser le hall et l'escalier du Centre administratif (l'actuel Beffroi). Plus de 1500 personnes sont venues l'écouter. Il faut reconnaître que la pensée de Michel Rocard n'est pas toujours aisée à comprendre. Il peut lui arriver d'avoir une approche "intellectuelle" des questions qu'il aborde. C'est le cas lors de cette réunion. Certains participants sortiront sans être sûr d'avoir parfaitement saisis tout ce qu'il a dit mais enthousiasmés et fiers qu'il se soit adressé à tous sans démagogie, sans baisser son niveau d'exigence intellectuelle.
Parole de vérité, la parole de Michel Rocard est aussi celle d'une conviction forte, de l'affirmation des principes et des valeurs du socialisme. Enfin, Michel Rocard c'est aussi une exigence morale qui fait trop souvent défaut.
Il m'est arrivé d'être en désaccord avec Michel Rocard. Au sein du PSU, comme du Parti socialiste, mes votes ont souvent été différents des siens. Mais l'homme, le militant était, est respectable. Il a tout mon respect.